Marco a écrit :Bernie19 a écrit :...J'imagine que cela crée un attachement et une relation unique à leurs machines. Et puis, faire défiler sa vie, à 60 km/h au son du Poum Poum de ces monos légendaires c'est quelque chose que l'injection électronique ou les freins à disques ne permettront jamais...
"Cette relation unique", comme tu dis, c'est (en tout cas pour moi) la sensation très gratifiante qu'on y est soi-même pour quelque-chose.
Rallier un point A à un point B avec un véhicule moderne prêt à rouler qu'on démarre en appuyant sur le bouton un peu comme on allume son lave-linge, c'est beaucoup moins satisfaisant que de rouler sur une moto (ou dans une auto) qu'il a fallu démonter, réparer, refaire, parfois en s'y reprenant plusieurs fois, avec lequel on a parfois connu des découragements, des envies de tout balancer, en se demandant si on n'est pas un peu con de dépenser tant d'énergie et parfois de pognon pour que ça marche alors qu'une moto moderne, c'est tellement plus facile.
C'est un peu comme mettre des chaussures ou s'assoir dans un canapé qu'on aurait fabriqué soi-même... on en connait les entrailles, on sait pourquoi telle pièce s'accorde avec une autre et on est fier, finalement, que ça fonctionne parce qu'on y a été pour quelque-chose.
C'est comme partager avec des amis un p'tit plat qu'on a cuisiné patiemment, qu'on a laissé mitonner en surveillant son feu, comparé à l'acte d'ouvrir au dernier moment un sachet d'une préparation industrielle toute faite. La préparation toute faite peut être bonne à manger aussi, mais on ne peut pas dire "c'est moi qui l'ai fait" : l'acte de création n'a pas eu lieu.
Rouler avec un véhicule sur lequel on a beaucoup bossé, c'est ça qui est gratifiant : on passe du statut de "consommateur" à celui "d'acteur", comme si le plaisir se mesurait aux efforts accomplis, à l'engagement qu'on y a mis et aux doutes qu'il a fallu surmonter.
C'est peut-être un peu maso car, objectivement, un véhicule neuf, ça marche mieux, c'est plus "sécurisant", moins incertain, plus facile... mais les sensations qu'on en retire au final sont beaucoup moins intenses que de rouler sur un vrai truc ancien qui ne serait plus qu'un vulgaire tas de ferraille si on ne s'était pas acharné à vouloir le refaire rouler contre toute logique "raisonnable".
C'est souvent une aventure à plusieurs aussi : sans l'aide de Pryt, de Jackymotos, de Yvemetz (pour une autre bécane) ou la connaissance et les conseils de Serge, sans les copains qui ont aidé à trouvé une pièce, je ne serais pas arrivé au même résultat.
Rouler sur un vieux truc, c'est aussi une inquiétude constante : est-ce que ça va tenir, est-ce que j'ai bien bossé dessus ? Est-ce que ce que j'ai consciemment négligé (par manque de temps, de compétence ou de budget), je ne vais pas le payer maintenant, par un bruit inquiétant, une panne ou une casse ? Dès lors, l'arrivé au but fixé est un soulagement et une satisfaction et le retour sans encombre est encore meilleur !
On est enfin "payé" de son travail et ce pour quoi on a fait des efforts, consacré du temps... on a donné sans réserve et enfin, on reçoit : le résultat est là, ça marche ! Et surtout, on a appris des choses, on s'est enrichi d'expérience, on en retire forcément le sentiment d'avoir avancé.
Je crois que c'est cette alternance de doutes, de difficultés et de plaisir qui rend les choses plus fortes, plus intenses au final.
Parfois, rouler sur un vieux truc comme tu dis, c'est aussi un sentiment de désespoir et de frustration. La panne irrémédiable sur le bord d'une route passante, sous la chaleur, avec la fatigue...
L'incapacité de réparer alors qu'on connaît la panne.
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