Un bref rappel historique sur la naissance et les premières années d’existence de la marque "Royal Enfield"...
Source principale ayant inspiré le texte : Royal Enfield, une légende vivante de Dirk. W. Köster publié aux éditions E.T.A.I. et Royal Enfield "The complète Story" de Mick Walker disponible sur www.crowood.com (Edité par Crowood press).
La naissance d’un mythe.
C’est au milieu du XIXème siècle, au cœur de l’angleterre Victorienne, qu’ une formidable aventure technologique et humaine commence …
C’est à Hunts End, un hameau dans le compté de Worchestershire, à environ 2 miles au Sud de Redditch, que Georges Townsend créé une société pour produire des aiguilles pour machines à coudre et des hameçons sous la marque "Givry Works". Désireux de diversifier son activité et constatant l’engouement naissant pour les déplacements individuels à bicyclette, il décide d’assembler puis de concevoir ses premiers deux roues à partir de 1880.
En 1890, la « Georges Townsend & co limited », confrontée à des difficultés financieres, est cédée à Albert Eadie qui en devient le nouveau directeur puisqu’il acquiert une majorité d’actions. Un directeur technique de la production, M. Robert Walker Smith, est rapidement recruté et société est ré-enregistrée sous le nom de "Eadie manufacturing". Eadie ne tarde pas à se rapprocher de la « Royal Small Arms Factory » d’Enfield située dans le Middlesex en lui fournissant des pièces pour des armes de poing. En 1893, cette association débouche sur la production par la nouvelle "Enfield Manufacturing Co Ltd" d’une bicyclette estampillée "Enfield". En 1896, la société prend le nom de "New Enfield cycle co ltd" pour devenir, un an plus tard, la "Enfield cycle co ltd". La marque "Royal Enfield" est ainsi née et le fameux slogan « Make like a gun » (fabriqué comme un fusil) sera désormais présent dans toutes les brochures et publicités pour vanter la précision et la fiabilité des produits de la marque... L’année 1897 est également l’année du transfert des sociétés d’Albert Eadie vers la ville de Redditch.
Un premier engin motorisé à quatre roues, le quadricycle à moteur français "De Dion", est conçu en 1897 par Robert Walker Smith. L’architecture du cadre est tubulaire, comme les bicyclettes et un passager peut prendre place sur l’avant du véhicule. Cet engin atypique, est propulsé par un moteur fixé à l’arrière du chassis, sous le siège du pilote. Il est doté d’une boîte à deux rapports et atteint la vitesse de 30 km/h avec le pilote et son passager... L’encêtre du quad est né ! Un modèle de tricycle est également produit durant la même période. Ces expérimentations à trois et quatre roues prennent fin en 1903.
Au début du Xxème siècle, l’attrait pour les déplacements individuels ne se dément pas et la première véritable motocyclette Royal Enfield est conçue en 1901.
Il s’agit d’une petite cylindrée à cadre tubulaire propulsée par un monocylindre Minerva deux temps de 172 cc fixé sur le té de fourche et surplombant la roue avant. Elle est équipée d’une transmission secondaire par courroie. Dès 1903, ce moteur reprend une place plus conventionnelle à proximité du palier de pédalier, abaissant judicieusement le centre de gravité de l’engin. Cette modification améliore grandement la maniabilité et l’agrément de conduite de la machine.
Voici l’une des rares illustrations de la toute première moto Royal Enfield (1901)
En 1904, Royal Enfield tente de se diversifier sa production vers le secteur des automobiles. Le succès très mitigé de cette activité décidera Eadie à abandonner rapidement cette activité et, dès 1907, à revenir à la production de deux roues.
Dès lors, la marque Royal Enfield innove avec plusieurs projets de monocylindres deux temps avant de faire un choix de motorisation primordial pour l’avenir : l’adoption en 1910 du bicylindre en V quatre temps qui constituera la base de nombreuses motorisations des gammes suivantes.
Les premiers bicylindres produits sont des 305 cc qui développent la modeste puissance de 2,25 ch, ce qui s’avère souvent bien insuffisant sur la route. Cependant, si ses performances sont en retrait, sa relative fiabilité semble séduire et l’apparition d’une transmission secondaire à chaîne, en lieu et place de la courroie confirme cette impression de rusticité.
Pour pallier ce manque flagrant de puissance, l’usine conçoit en 1912 le modèle 180, un nouveau biclindre motorisé par JAP en V de 770 cc et doté d’une boîte à deux rapports. Ce fameux moteur est décliné dans de nombreuses versions et équipe également plusieurs gammes d’attelages dont les anglais sont très friands à cette époque. Les attelages sont certes très appréciés en tant que véhicules de loisir mais ils sont surtout utilisés par les entreprises pour le transport de marchandises et les livraisons. De nombreuses variantes, adaptées en fonction des métiers voient ainsi le jour.
Dès 1913, Royal Enfield innove à nouveau avec un interessant concept de bicylindre en V doté d’une admission au-dessus de l’échappement (Inlet over Exhaust – IOE). Ce moteur fait 425 cc, il est doté d’une distribution alternée avec une soupape d’admission en tête et une soupape d’échappement latérale. Mais l’innovation majeure de ce moteur consiste en un procédé de lubrification particulièrement efficace, avec un réservoir d’huile en verre transparent permettant d’en contrôler le niveau. Ce procédé de lubrification novateur réduit considérablement les fumées émises et laisse momentanément la concurrence loin derrière.
Un attelage de 1913
L’année 1914 voit le retour d’une production de modèles deux temps parmi lesquels la fameuse 225 L destinée plus particulièrement à la clientèle féminine. Elle est légère, maniable et d’un accès facile avec une jupe longue grace à une géométrie du cadre étudiée. Le succès de ce modèle sera immédiat auprès de la gente féminine et il sera commercialisé sous diverses variantes jusqu’en 1929 !
La première guerre mondiale.
La firme Royal Enfield décroche un gros contrat pour la fourniture de motos et d’attelages militarisés. L’attelage est motorisé par un V twin de 6 ch, le WWI (World War I) qui sera équipé d’une mitrailleuse « Vickers ». Une version « ambulance » équipée d’une civière sera également mise en production.
Royal Enfield fournit également les Russes en attelages militarisés pendant la même période et l’usine tourne à plein régime.
Peu après les hostilités, Smith recrute un ingénieur de talent, Ted Pardoe, qui contribuera remarquablement au développement des gammes ultérieures.
L’attelage WWI avec la mitrailleuse "Vickers".
Une V twin 488 cc de 1914 avec son réservoir d’huile en verre ...
Un bel attelage V Twin de 1915
Un prototype 3 cylindres 2 temps de 675 cc en 1916
Modèle 180 de 1918 et son moteur V twin de 776 cc
Les années folles
Un modèle 225 cc de 1922
1922 : Le V twin de 976 cc
En 1923, Robert Walker Smith prend le poste de directeur de l’usine. La réputation et le sérieux de la marque sont dès lors reconnus par tous grâce à l’esprit d’innovation qui règne dans l’entreprise mais aussi à l’implication active des salariés dans le processus de conception des machines.
Ce succès est également porté par une politique commerciale judicieuse qui consiste à concevoir des gammes diversifiées dont certains modèles sont très accessibles financièrement pour toucher un public de toutes conditions sociales...
Cette réussite est encore accentuée après l’arrivée, en 1925, d’un autre ingénieur chevronné : Tony Wilson-Jones. Celui-ci restera tout comme Ted Pardoe, jusqu’en 1950, au service de la marque de Redditch. Il jouera un rôle primordial dans les domaines de la recherche, de la qualité et de la formation des ouvriers.
En 1924, Pardoe et Wilson conçoivent une nouvelle machine dotée d’un monocylindre 4 temps en V de 346 cc à soupapes latérales qui remplace la motorisation JAP précedemment utilisée.
Une 350 cc modèle 1925
et le modèle pour les Ladies à cadre ouvert...
1925 la 350 modèle "351"
En 1927, ce mono est remplacé par un 488 cc doté de la même distribution. Ce dernier modèle inspirera le futur bicylindre en V de 976 cc. La clairvoyance de ces ingénieurs permet de multiplier les motorisations tout en conservant de nombreux composants moteurs interchangeables. C’est ainsi qu’il peuvent développer une gamme diversifiée tout en réduisant les coûts de production. Ce concept de rationalisation des plateformes est d’ailleurs couramment utilisé aujourd’hui, notamment chez les constructeurs automobiles.
En 1928, la gamme Royal Enfield est riche de treize modèles différents.
Le modèle A doté d’un mono deux temps de 225 cc,
Le modèle B toujours en 225 cc mais en 4 temps à soupapes latérales,
Le modèle C motorisé par un monocylindre de 346 cc à soupapes latérales
( avec son alésage x course de 70 X 90 qui sera repris plus tard par la célèbre Bullet).
Le modèle F également doté d’un monocylindre de 346 cc à soupapes latérales
Le modèle G avec son monocylindre 4 temps de 346 cc mais à soupapes culbutées
et arbre à came en tête.
Le modèle CO également avec monocylindre 4 temps de 346 cc à soupapes culbutées
Le modèle D avec son mono 488 cc à distribution latérale
Le modèle H avec son mono 488 cc à distribution latérale également
Le modèle HA avec son mono 488 cc à soupapes culbutées
Le modèle E lui aussi équipé d’un mono de 488 cc à soupapes culbutées
Les modèles J et JA lui aussi équipé d’un mono de 488 cc à soupapes culbutées
Le modèle K, bicylindre 4 temps en V de 976 cc et à distribution latérale.
Modèle 182 976 cc de 1928
La crise de 1929
L’optimisation des process de fabrication mis en place par les frères Smith et le maintien en gamme de petites cylindrées accessibles permettent à l’usine de mieux résister que les autres fabricants de motos à la crise. C’est d’ailleurs le petit "modèle A" de 225 cc (deux temps) qui se vend le mieux et assure une bonne partie du financement des autres innovations.
1929 : Modèle 182 V twin 976 cc
En 1930, un nouveau modèle « CO » de 346 cc a soupapes culbutées et réputé très nerveux, suivi rapidement par les modèles « HA » et« JA » vient enrichir la gamme.
La véritable nouveauté en 1931 sera sans doute la JF 31. Le moteur dont l’alésage et la course ne sont pas modifiés comporte désormais une culasse dotée de quatre soupapes inclinées des deux côtés pour en augmenter les performances.
Modèle K 976 cc - 1931
En 1932, un nouveau moteur de 249 cc voit le jour soit avec des soupapes latérales pour le modèle B, soit avec arbre à cames en tête pour le modèle BO.
Un modèle d’exception apparaît ensuite sur la base du fameux modèle K. Le bicylindre en V de 976 cc dont la course est portée à 99,5 cm passe à 1140 cc. Cependant, ce modèle haut de gamme est réservé à l’exportation ce qui provoque la colère des motards anglais...
1932 - Modèle A 225 cc
1932 - Modèle H
En 1933 Robert Walker Smith décède. L’ainé de ses trois fils, Frank, reprend les rênes de l’entreprise aidé par ses deux frères.
Cette association familiale aura un effet bénéfique sur la prospérité de l’entreprise dans les années qui suivront.
Fin de la première partie ...
.... à suivre, entre autre, la naissance de la Bullet ...
Nelska - nov 2007